Après une âpre bataille juridique, considérée comme la plus longue et la plus onéreuse de l'histoire judiciaire du Botswana, le tribunal a reconnu aux Bushmen de la minorité San le droit de retourner sur leurs terres ancestrales de la Réserve centrale du Kgalagad (CKGR), dans le désert du Kalahari.
La Haut Cour de justice du Botswana, siégeant à Lobatse, à quelque 70 kms au sud de Gaborone, la capitale, a jugé mercredi dernier que les San avaient été injustement expulsés de leurs terres ancestrales en 2002.
Après une âpre bataille juridique, considérée comme la plus longue et la plus onéreuse de l'histoire judiciaire du Botswana, le tribunal a reconnu aux Bushmen de la minorité San le droit de retourner sur leurs terres ancestrales de la Réserve centrale du Kgalagad (CKGR), dans le désert du Kalahari.
La Haut Cour de justice du Botswana, siégeant à Lobatse, à quelque 70 kms au sud de Gaborone, la capitale, a jugé mercredi dernier que les San avaient été injustement expulsés de leurs terres ancestrales en 2002.
Le gouvernement, qui envisageait de créer sur ces terres une zone de protection de la vie sauvage et de développement touristique, avait mis en place en 1997 un programme de relocalisation des Bushmen.
Des associations de défense de droits de l'homme, qui s'étaient élevées contre l'éviction des Bushmen de leurs terres ancestrales au profit de groupes d'exploration de gisements de diamant, avaient alors poussé quelque 244 anciens habitants de la réserve de CKGR à intenter un procès contre les autorités botswanaises en 2002.
Pour le gouvernement, la relocalisation des Bushmen s'est toujours faite dans la négociation et avec leur consentement.
« Pour nous Bushmen, c'est le plus beau jour de notre vie. Nous avons tant pleuré de peine ; aujourd'hui nous pleurons de joie. Enfin, nous somme libres. L'éviction de nos terres a été très durement ressentie par mon peuple. J'espère que nous retrouverons bientôt nos terres », a déclaré Roy Sesana, ancien habitant de la CKGR et leader du mouvement First People of the Kalahari (FPK) - Premiers habitants du Kalahari - un groupe de défense des droits de la communauté Bushmen.
« Nous sommes heureux », a lancé Jumanda Gakelebone, porte-parole du FPK.
Pendant le procès, deux des trois juges ont estimé que les principales revendications des Bushmen étaient légitimes, et le jugement de la Cour devrait faire jurisprudence dans les autres procès intentés dans d'autres pays par des communautés indigènes dépossédées de leurs terres ancestrales.
Pour Stephen Corry, directeur de Survival International, une organisation de défense des droits de l'homme, le verdict de la Cour est une « victoire pour tous les peuples indigènes d'Afrique, mais aussi pour le Botswana. Si le gouvernement applique rapidement la décision de la Cour, le combat pour le retour des Bushmen sur leurs terres prendra fin et cela rehaussera le prestige du pays. »
La seule voix discordante a été celle du président de la Cour, Maruping Dibotelo qui, dans un premier temps, avait donné raison au gouvernement. Son intervention avait alors provoqué le mécontentement des centaines de Bushmen venus de très loin pour assister à l'audience et entendre le prononcé de ce jugement historique.
La deuxième juge, Unity Dow, a estimé que l'éviction des populations indigènes de leurs terres était un acte « anticonstitutionnel » et « illégal », une déclaration qui a visiblement réjouit tous les Bushmen présents au procès. « Le gouvernement n'a pas tenu compte des conséquences de son programme de relocalisation qui a parfois semé la discorde au sein des familles entre les membres favorables ou opposés à la relocalisation », a-t-elle commenté.
Le troisième juge, Mpaphi Phumaphi, a été encore plus catégorique dans son jugement. Selon lui, le refus des autorités de délivrer des permis de chasse aux Bushmen vivant encore à CKGR « revenait à les condamner à mourir de faim. »
M. Dibotelo, Président de la Cour, a ensuite prononcé déclaré : « Avant le 31 janvier 2002, les plaignants étaient en possession des terres qu'ils occupaient légalement dans la CKGR [Réserve centrale du Kgalagad]. Les plaignants ont été privés de ces possessions pas la force, à tort et sans leur consentement ».
En conséquent, le refus du gouvernement d'autoriser les Bushmen à retourner sur leurs terres était « illégal et anticonstitutionnel », a-t-il ajouté.
La CKGR est une réserve ayant une superficie égale à celle de la Suisse. Cette réserve a été créée par le régime colonial britannique, avant l'indépendance du Botswana en 1966, qui reconnaissait aux Bushmen le droit de rester sur leurs terres ancestrales qu'ils occupent depuis plusieurs millénaires.
Dans sa plaidoirie, M. Gordon Bennett, avocat des Bushmen a déclaré que les Bushmen « disposent d'un droit d'exploitation et d'occupation » de la terre et qu'aucune loi, tant sous le système colonial britannique que sous le gouvernement botswanais, n'a été votée pour leur supprimer ce droit.
Pendant la phase de relocalisation, les réservoirs d'eau et le bétail de la communauté ont été saisis, a ajouté M. Bennett, et l'interdiction de la pratique de la chasse dans la réserve a fait d'eux des « intrus sur leurs propres terres. »
Les Bushmen de la réserve ont utilisé des ânes pour assurer le transport de l'eau, mais ces animaux ont aussi été confisqués par le gouvernement qui a invoqué le risque de maladie que les ânes font courir à la faune sauvage.
Des milliers de Bushmen évincés étaient prêts à retrouver leur réserve, après le prononcé du jugement qui indique toutefois que le gouvernement n'est pas tenu de fournir des services de base - de l'eau par exemple - à ceux qui choisiront de retourner à la CKGR.
Le gouvernement du Botswana n'a pas encore indiqué s'il entendait faire appel de ce jugement.